Ci-après l’entretien accordé par M. le Ministre à l’Economiste intitulé « Loi de finances 2020 : Benchaaboun annonce de nouvelles mesures fiscales » :
« L’Economiste : Où en êtes-vous dans le projet de
loi-cadre relatif à la réforme de la fiscalité, sachant que le projet de
loi de finances 2020 devra en comporter les premières dispositions?
- Mohamed Benchaaboun : Comme je m’y étais
personnellement engagé, l’élaboration de la loi-cadre a été entamée au
lendemain de la tenue des Assises nationales sur la fiscalité en vue
d’instaurer les bases, les principes et les objectifs de la réforme
fiscale. Ce projet est quasiment finalisé sur le plan technique et sera
incessamment transmis au Secrétariat général du gouvernement pour
examen. Nous engagerons ensuite le processus de son approbation.
Néanmoins, le projet de loi de finances 2020 incorporera nécessairement
les premières mesures allant dans le sens des recommandations des
Assises.
- La tendance est de plus en plus forte pour aller vers
des aides directes aux entreprises au lieu des dépenses fiscales pour
des secteurs. Comment cela se traduira-t-il sur le terrain ?
- La rationalisation des dépenses fiscales figure parmi les
recommandations phares des Assises nationales sur la fiscalité. La
tendance vers l’octroi des aides directes s’inscrit dans une approche
économique visant une gestion efficace des appuis apportés par l’Etat à
l’entreprise. Ainsi, il est question de ne plus recourir
systématiquement aux incitations fiscales lorsqu’il serait possible de
faire bénéficier l’entreprise d’un avantage financier équivalent sous
forme de subventions encadrées par la législation et la règlementation
en vigueur.
- Lors de votre nomination, les instructions royales pour
la restructuration du portefeuille de l’Etat étaient claires.
Qu’avez-vous entrepris dans ce dossier ?
- Suite aux
hautes orientations royales, notamment celles prodiguées lors du Conseil
des ministres du 10 octobre 2018, le ministère de l’Economie et des
Finances a entamé le déploiement d’un plan d’action visant la
restructuration de certains établissements et entreprises publics (EEP).
Ce plan prévoit la révision de leurs modèles économique et
institutionnel, la cession de certains actifs et la rationalisation de
leurs dépenses et ce, dans le cadre de contrats-programmes avec l’Etat.
Dans ce cadre, les travaux ont été lancés, pour un certain nombre de
grands établissements dont l’ONEE, l’ONCF et d’autres, visant les
objectifs suivants. L’un concerne la révision des modèles d’organisation
et l’amélioration de la gouvernance des organismes concernés dans le
sens d’une meilleure maîtrise de leur gestion et d’une plus grande
ouverture à des partenariats sur la base de plans d’affaires
économiquement viables et en phase avec leurs missions prioritaires. Un
autre objectif a trait au recentrage sur les missions de base par la
cession des participations dans des filiales et des actifs non
nécessaires à l’exploitation. Le but est d’assainir la situation
financière et d’améliorer les délais de paiement. Un autre objectif
concerne l’optimisation des charges d’exploitation et de structure.
- Où en êtes-vous dans le chantier des retards de paiement ?
- Les hautes orientations contenues dans le discours royal du 20 août
2018, adressées aux administrations publiques et aux collectivités
territoriales pour qu’elles s’acquittent de leur dû aux entreprises, ont
insufflé une véritable dynamique autour de la problématique des retards
de paiement. Elles ont été suivies d’effets découlant de nombreuses
actions de réforme, de mesures concrètes pour le traitement de cette
problématique et d’actions de sensibilisation des différentes parties
prenantes.
C’est dans ce cadre que j’ai adressé une première
circulaire dès le 18 septembre 2018 aux dirigeants des EEP pour les
sensibiliser à la question des délais de paiements et à la nécessité de
faire preuve d’exemplarité à travers la mise en place de systèmes
d’information, de dispositifs de veille et suivi et de mesure des
progrès accomplis en la matière. Ainsi, et afin de fluidifier et
d’accélérer les échanges entre les fournisseurs et leurs donneurs
d’ordre, il a été procédé au développement et à la mise en ligne de
plateformes électroniques dont celle permettant le traitement des
réclamations des fournisseurs adressées aux EEP, en l’occurrence la
plateforme «Ajal» mise en ligne le 4 octobre 2018.
Par ailleurs,
la deuxième réunion de l’Observatoire des délais de paiement, tenue le
24 juin 2019, était l’occasion de faire le bilan des réformes réalisées,
d’annoncer de nouvelles mesures et d’affirmer les engagements des
parties prenantes concernées dans l’ambitieux chantier relatif à la
réduction des délais de paiement et des dettes fournisseurs des secteurs
public et privé. De même, cette réunion a permis de poser les premières
bases de l’Observatoire afin de lui permettre de jouer pleinement son
rôle de force de proposition et d’éclairer l’opinion publique, dont son
plan d’action pour les années 2019 et 2020 et les modalités
d’élaboration et de publication de son premier rapport, tant attendu
comme référentiel sur cette question.
- Comment s'est déroulée la cession des parts de l'Etat dans le capital de Maroc Telecom?
- Conformément aux exigences légales et réglementaires régissant les
opérations de privatisation, les travaux de valorisation pour la
réalisation de l’opération Maroc Telecom ont été engagés. Cela avec
l’accompagnement de deux groupements de banques d’affaires nationales,
mandatées par le ministère après une large consultation et d’une
troisième banque d’affaires internationale, mandatée en tant que
conseiller de Maroc Telecom. Ceci a permis de croiser les fourchettes de
valorisation et a conforté l’organisme d’évaluation dans sa fixation du
prix minimum de l’action à 125 DH. Par ailleurs, cette opération de
cession est la plus importante jamais réalisée sur la Bourse de
Casablanca depuis 2004 et les institutionnels sont déjà engagés dans le
capital de cette société à hauteur de près de 20 milliards DH.
A
l’issue de cette opération, le prix moyen global de cession est ressorti
à 126,29 DH l’action ainsi réparti : 127 DH pour 6% du capital dans le
cadre de la cession de blocs, 117,80 DH pour la tranche des salariés et
125,3 DH pour le reste de l’OPV.
- Quand et combien comptez-vous lever sur le marché financier international ?
- Une sortie sur le marché financier international est effectivement
programmée pour cette année. Le choix de la fenêtre de sortie dépendra
des conditions dans les semaines à venir, lesquelles devraient être
favorables pour assurer un accueil positif des investisseurs
obligataires internationaux et donc un retour réussi du Maroc sur ce
marché. Pour ce qui est du montant à lever, il s’agira d’une taille
benchmark d’un minimum de 1 milliard (€ ou $) pour assurer une certaine
liquidité aux investisseurs. Les choix de la devise et du volume
dépendront bien entendu des conditions de marché. »